Des épices qui poussent en pleine forêt tropicale en permaculture au Sri Lanka, un véritable modèle de forêt-jardin

Le lundi 10 février, après une semaine de visites dans le triangle culturel formé par Anurâdhapura, Polonnâruwâ et Kandy, on part à la rencontre de notre premier producteur d’épices. D’habitude, on se déplace en transports locaux mais cette ferme n’est accessible qu’en voiture, aux environs de Kandy.

A la sortie de notre chambre d’hôtes, on remarque un jeune chauffeur dans une Suzuki bas de gamme sans appui-tête. Et dire que les sièges dans les bus publics sont plus confortables ! A peine installés, on explique notre concept au chauffeur sans plus tarder mais il n’a pas l’air très bavard alors on se laisse mener sur les routes chaotiques. A la sortie de Kandy, les paysages deviennent rapidement plus naturels, entourés de collines verdoyantes.

Lorsqu’on arrive dans la localité la plus proche de notre ferme, le chauffeur perd ses moyens et ne trouve pas le chemin. On doit relever que c’est plutôt inhabituel d’emmener deux étrangers au milieu de la forêt tropicale sri lankaise. Après plusieurs appels avec le producteur d’épices et aller-retours sur la même route, il parvient à s’engager sur un chemin terreux et très étroit qui secoue fortement la voiture budget de droite à gauche. Pourvu qu’un pneu ne crève pas ! Après une quinzaine de minutes, un portail ouvert nous laisse deviner qu’on devrait bientôt finir par tomber sur les plantations tant recherchées.

Ça y’est ! Dhammi, le cultivateur se tient à l’entrée de sa ferme et nous invite à s’asseoir à discuter à l’intérieur. On est très enthousiastes d’échanger sur son approche innovatrice d’agriculture naturelle, tout en sirotant un délicieux jus d’oranges (qui sont de couleur verte au Sri Lanka) sucré au miel et fait maison avec les produits de sa ferme. On était en contact avec lui depuis début décembre et à peine deux mois plus tard, on se retrouve enfin face à lui, en pleine nature. C’est comme si un rêve s’était réalisé !

Il nous explique qu’il pratique l’agriculture zéro déchet. Ses plantations se gèrent sur la base d’un circuit fermé, sans gaspillage, où les déchets de chaque processus deviennent la matière première d’un autre processus.

Il nous explique qu’il pratique l’agriculture zéro déchet. Ses plantations se gèrent sur la base d’un circuit fermé, sans gaspillage, où les déchets de chaque processus deviennent la matière première d’un autre processus.

Ainsi, son compost est activé par les micro-organismes provenant d’un liquide qu’il crée lui-même, à base d’eau de rinçage du riz, de restes de riz, de miel et de lait. Certains déchets de cuisine sont utilisés pour alimenter le compost. D’autres pour nourrir le bétail qui lui-même enrichi le compost par leurs excréments et leur urine. Quant au biogaz, il s’agit du méthane résultant du processus de fermentation des matières organiques, employé pour la cuisine et pour l’électricité de sa ferme.

Il nous parle aussi de la permaculture et de la biodynamie, en insistant qu’il ne se contente pas seulement de cultiver sans produits chimiques mais en protégeant l’environnement, les traditions agricoles, les semences et le bien-être de tous les autres êtres vivants.

Autour de sa ferme, les feuilles des arbres sont ainsi laissées au sol, des coques de noix de coco séchées retiennent la terre par endroit et il prépare même un vermicompostage qui renforce les plantes. Il n’utilise aucun fertilisant naturel qu’il n’a pas préparé lui-même, ses semences proviennent uniquement de ses sols, tout en s’appuyant sur la science védique ancienne et la thérapie HOMA.

Cette science védique purifierait l’atmosphère, le sol et l’eau grâce à un feu au lever et au coucher du soleil, et à une préparation à base de bouse de vache séchée, de ghi et de quelques grains de riz.

Moins mystique que la première, sa deuxième méthode qui est de cultiver en permaculture permet de maintenir un sol fertile grâce à l’organisation des systèmes en s’inspirant des écosystèmes naturels.

Tout comme en biodynamie, on parle aussi de l’énergie de la terre et du ciel. Certaines préparations à base de produits d’origine de la vache, qui est sacrée en Inde, permettent de stimuler ces énergies. Accompagné de mantras en sanscrit, ce rite spirituel se rapproche un peu de l’astrologie. Moins mystique que la première, sa deuxième méthode qui est de cultiver en permaculture permet de maintenir un sol fertile grâce à l’organisation des systèmes en s’inspirant des écosystèmes naturels.

Après des années d’observation, son jardin-forêt se répartit en 7 strates, de la canopée qui est la strate supérieure de sa forêt, à la couche verticale de plantes grimpantes comme le poivre. Ces étages de végétation encouragent la biodiversité, tout en rendant sa forêt-jardin plus productive, en respectant l’environnement. Aujourd’hui, Dhammi transmet son savoir-faire agricole à 15 fermiers.

Des épices qui poussent en pleine forêt tropicale en permaculture au Sri Lanka, un véritable modèle de forêt-jardin

Après ces échanges, on s’en va pour la visite de son domaine où l’on découvre toutes sortes d’herbes médicinales pour soigner un rhume, réduire le taux de sucre dans le sang ou favoriser la digestion. La médecine ayurvédique est largement utilisée au Sri Lanka car n’oublions pas que l’Inde ne se situe qu’à seulement 30 kilomètres et que ses influences sont nombreuses.

Dhammi s’est lui-même soigné grâce aux plantes sur recommandation de son grand-père qui était un médecin ayurvédique. En période de stress, il souffrait de vertiges et de maux de gorge chroniques mais une détoxication à base de plantes l’a remis sur pieds. C’est d’ailleurs à partir de ce moment-là qu’il a réalisé que la nature avait de forts potentiels de remèdes naturels.

En Europe, on ne trouve que très rarement des poivres de qualité car le temps d’acheminement jusqu’à notre poivrier est trop long. En le goûtant ainsi fraîchement récolté, c’est une redécouverte de cette baie qui picote et qui reste longtemps en bouche.

Sur le chemin, on goûte son poivre très croquant qui est récolté en décembre et en juillet. Tout de suite, on se dit : « deux récoltes par année pour deux fois plus de fraîcheur ! ». En Europe, on ne trouve que très rarement des poivres de qualité car le temps d’acheminement jusqu’à notre poivrier est trop long. En le goûtant ainsi fraîchement récolté, c’est une redécouverte de cette baie qui picote et qui reste longtemps en bouche.

Dhammi nous montre aussi ses machines pour nettoyer, moudre et dissocier les poivres. Le poivre blanc est séparé de son enveloppe extérieure, nommée péricarpe, alors que le poivre noir est séché entièrement au soleil. Quant au poivre vert, il est récolté avant sa maturation. Plus loin, il nous montre aussi un four solaire et un four à bois qu’il utilise pour sécher certaines épices comme la cardamome.

Des épices qui poussent en pleine forêt tropicale en permaculture au Sri Lanka, un véritable modèle de forêt-jardin

On découvre ensuite un fameux cannellier de Ceylan qui apprécie particulièrement le soleil. C’est un arbuste de la famille du laurier dont l’écorce est prélevée, nettoyée, enroulée et séchée. Mais en déchirant simplement une feuille du cannelier, toutes les saveurs de la cannelle s’échappent. Après tout ce temps passé en Suisse où l’on se réjouissait d’observer les cannelliers, on est heureux de les découvrir dans cette forêt tropicale, au cœur d’un environnement sauvage.

Plus loin, à l’ombre on reconnaît quelques plantes de cardamome que l’on identifie facilement suite à nos voyages précédents en Inde. Très douces, les graines noires de l’intérieur de la gousse rafraîchissent l’haleine et facilitent la digestion.

En passant par le potager, Dhammi récolte un chou-fleur, une aubergine, des herbes, des racines de curcuma et un ananas qu’on dépose à l’entrée de sa ferme, avant de continuer notre visite vers la lisière de la forêt. C’est ici en-dehors de la jungle qu’il cultive un riz rouge, bien plus nutritionnel que le traditionnel riz blanc. C’est surprenant d’apercevoir des rizières alors qu’on était dans une forêt-jardin il y a quelques minutes. Tout est si bien pensé que Dhammi se nourrit exclusivement de produits de sa ferme.

Des épices qui poussent en pleine forêt tropicale en permaculture au Sri Lanka, un véritable modèle de forêt-jardin
Des épices qui poussent en pleine forêt tropicale en permaculture au Sri Lanka, un véritable modèle de forêt-jardin
Des épices qui poussent en pleine forêt tropicale en permaculture au Sri Lanka, un véritable modèle de forêt-jardin

En passant par le potager, Dhammi récolte un chou-fleur, une aubergine, des herbes, des racines de curcuma et un ananas qu’on dépose à l’entrée de sa ferme, avant de continuer notre visite vers la lisière de la forêt.

On passe ensuite auprès d’un papayer qui offre de magnifiques papayes à l’année, d’un oranger, on remarque aussi des haricots longs, de la citronnelle et des feuilles de rampe qui sont utilisées dans les curries sri lankais. C’est fabuleux comme toutes ces couches de végétation diversifient la production et poussent en harmonie.

C’est fabuleux comme toutes ces couches de végétation diversifient la production et poussent en harmonie.

Avant de repartir, Dhammi nous invite à manger sur sa terrasse. Pendant qu’il prépare le repas avec deux de ses employés, on avait bien pensé qu’on allait goûter à ce qu’il avait ramassé pendant notre visite.

Soudain, ils nous servent un curry de chou-fleur, un curry d’aubergine, du poulet, du sanglier, du riz rouge, un sambal d’herbes fraîchement cueillies, puis de la banane rouge et de l’ananas pour le dessert. C’est un véritable régal !

Notre chauffeur est aussi invité à table et avoue que ça faisait longtemps qu’il n’avait pas mangé une cuisine autant fraîchement préparée. Il faut relever qu’on n’avait jamais mangé une banane rouge autant savoureuse et une eau infusée à la citronnelle si goûteuse. Le sambal d’herbes était aussi un pur délice totalement naturel et les curries de légumes parfaitement cuits. Ce fût bien évidemment notre meilleur repas au Sri Lanka jusque-là !

Des épices qui poussent en pleine forêt tropicale en permaculture au Sri Lanka, un véritable modèle de forêt-jardin

Avant de repartir, on promet à Dhammi de le revoir à Colombo à la fin de notre séjour pour recevoir quelques échantillons d’épices, puis on repart sincèrement émerveillés et confiants par cette visite de forêt-jardin.

Sur la route du retour, on n’a pas très envie de retourner dans la ville bruyante et polluée de Kandy après s’être ressourcés une journée entière au cœur de cette forêt tropicale calme qui a tant de trésors à nous offrir.

Mais on est surexcités à l’idée d’avoir rencontré LE bon partenaire qui a tout de suite compris notre démarche : on ne recherche pas de la quantité mais de la qualité et on est persuadés que si les épices poussent au milieu d’une nature traitée avec beaucoup de respect, elles seront encore plus goûteuses et saines pour notre corps. 

 
 

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